"Ce matin,
à treize heures pile,
une grande fanfare nous réveille.
Les klaxons crient dans nos oreilles,
interminables,
insistants ;
ils nous appellent au dehors :
personne ne se marie aujourd’hui non plus,
il n’y a pas de soie blanche,
de banderoles,
de fleurs sur les voitures,
de frou-frou,
non,
ce sont les éboueurs
éboueuses,
qui épousent
la ville,
pour le meilleur et pour le pire.
Un carnaval de camions
se déploie sur la nationale,
ce sont eux.
les invisibles,
les oubliés.
Toutes les fenêtres du quartier
encadrent les petites têtes
curieuses
des habitantes
les habitants qui observent en silence
ce défilé hurlant
depuis leurs cuisines.
“courage”
“soutien à nos héros”
“ensemble”
les mots défilent sur les camions
de grandes lettres bariolées
déclamées au feutre.
Merde,
je pleure encore.
Les poubelles… ces grands masques
qui dissimulent le vrai visage
de nos sociétés sales,
sociétés de surconsommation,
société de déchets et de débris,
se cachant derrière le tri-sélectif.
Derrière ces masques verts et jaunes
disparaissent nos méfaits,
nos hontes, notre saleté repoussante.
La façade propre sourit.
Les éboueuses
éboueurs,
les détenteurs de nos méfaits.
En secret.
seul-e-s à voir le vrai visage."
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